Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
les propos de madère
21 mai 2015

Les propos de Madère

Degré zero de la politique

 

Nicolas Sarkozy, dans ses réunions bi-hebdomadaires, a repris son numéro de « stand up ». Il brocarde à tout va ses adversaires, donne dans la caricature et l’excès. Il suscite, dans les salles dans lesquelles il se produit, les rires gras d’un public acquis par avance à ce nouveau « showman ».

Il a des cibles favorites : Christiane Taubira et Najat Vallaud-Belkacem. Les attaques qu’il porte contre elles sont très peu liées au fond de la politique qu’elles mènent dans les ministères respectifs mais, pour l’essentiel, se servant toutefois des réformes qu’elles portent, il s’en prend aux personnes. Il vise ainsi à conquérir un électorat très proche du Front national rejetant ou stigmatisant tous ceux qui sont différents par leur couleur de peau ou leurs origines géographiques.

En agissant ainsi il ne se grandit pas. Il n’en a cure tant le mépris de l’autre dicte sa conduite. Et puis, disons-le, ce comportement lui évite, pour l’instant, de parler, dans le détail,  de son projet politique. La polémique basse, vulgaire, indigne d’un ancien Président de la République, lui sert de rideau de fumée à défaut de programme. Il ne peut ignorer que cette attitude ne saurait durer et que, bientôt, au lendemain du congrès de son Parti, où il va triompher sans péril et pavoiser à l’envi, il devra dépasser le cadre des attaques personnelles. Il devra dire dans quelle direction il conduirait le pays, quelles seraient ses options économiques et sociétales,  si d’aventure il revenait à l’Elysée.

Il recule ce moment à la fois en s’en prenant aux personnes mais aussi en annonçant que quasiment toutes les lois importantes votées par la gauche seront abrogées s’il revenait au pouvoir.

Belle perspective…

Cela ne suffira pas à éviter le débat d’abord au sein du parti qu’il dirige et au-delà lorsque ce parti, après son congrès de fin mai, rendra public son programme dans les mois qui suivront. Sa stratégie d’évitement arrivera  alors à son terme.

Cependant, lorsqu’il s’agit de coups tordus, il dispose toujours de réserves. Ainsi, il vient de rajouter aux cibles, Christiane Taubira et Najat Vallaud-Belkacem, son successeur à l’Elysée. Là, il est encore moins, si cela est possible, dans la demi-mesure. Il cogne, tape et vise à décrédibiliser celui qu’il considère, dans la perspective de 2017, comme son principal adversaire.

Par dérision, ou effet de style disent ses proches, il ne parle plus de François Hollande.  Il le surnomme « Moi Je ». Quelques citations des propos récemment tenus par Nicolas Sarkozy illustrent bien cette façon méprisante de s’en prendre à l’actuel chef de l’Etat. Il dit ainsi : « Moi Je écoute bien, ça va aller mieux économiquement en 2017. Y a un Poids Mort pour la France qui appartiendra au passé ». Puis il poursuit ainsi : « Il va fêter son troisième anniversaire avec Fidel Castro devenu pour lui une  référence. Une référence de quoi ? « D’avoir fait de Cuba pendant plusieurs décennies une prison à ciel ouvert ? ». Sarkozy oublie alors ses relations sulfureuses avec Khadafi et Bachar- el-Assad…

L’important pour lui n’est pas la référence à Castro mais de distiller ses vannes : « Moi Je », « poids mort pour la France », etc… Se contorsionnant à la tribune des meetings qu’il tient, appuyant ses propos par des mimiques de contentement du type qui est bien au-dessus des gens qu’il stigmatise, il agite alors ses épaules dans un tic habituel chez lui et  recueille les applaudissements faciles d’un public trié sur le volet et tout acquis à sa personne. La politique n’en sort pas grandie, mais il est content de lui…

Est-ce cela la politique ? Certainement pas. Sarkozy, et ceux qui le soutiennent, n’échapperont plus longtemps au vrai débat. Ils seront débusqués dès qu’ils exposeront le détail de leurs choix pour le pays.

Pour l’instant il fait « mumuse ». Ainsi, il vient – cela fait moderne à bon compte – de susciter un pseudo dialogue sur twitter, moyen de communication à la mode. Quarante mille personnes se sont, d’apparence, prêtées au jeu. Il semblerait qu’elles étaient, au grand dam des communicants qui entourent Sarkozy,  majoritairement critiques dans leurs questions. Cela a été très largement occulté dans la presse. Les folliculaires (1) qui peuplent beaucoup de journaux n’ont mis en valeur – c’est étonnant de stupidité – que le tweet du fils de Nicolas Sarkozy – Louis – réclamant une plus grande télévision à son père. Celui-ci lui a répondu « qu’il convenait, avant, qu’il limite son addiction à son ordinateur » !

On le voit, on est, là encore, dans la grande politique…

Sarkozy n’est pas le seul à s’en prendre aux personnes. Il a fait école. Dans une sorte de ballet bien réglé, beaucoup d’anciens ministres et actuels députés de l’opposition, s’acharnent en permanence sur Christiane Taubira et Najat Vallaud-Belkacem. Celle-ci, portant la difficile réforme des collèges, est particulièrement visée en ce moment. Peu lui opposent des arguments autres que ceux la renvoyant à « ses insuffisances et à sa médiocrité supposées». Ciotti, député des Alpes maritimes, et Sarkozy lui-même s’illustrent dans ce registre peu élégant d’affirmations blessantes et très éloignées du débat d’idées qui devrait prévaloir en démocratie.

S’agissant de cette réforme, soulignons toutefois que seule une petite minorité de dirigeants de la future ex-Ump avancent des arguments (2). Encore faut-il remarquer que les idées émises, au-delà d’être contestables et maximalistes, s’inscrivent davantage dans « la course à l’échalote » dans la perspective de la primaire à droite pour 2016 que dans un souci réel de proposer un dispositif alternatif réellement applicable.

Ceci rappelé, force est de convenir, une nouvelle fois, que la majorité des dirigeants de l’opposition, profitant de la contestation du milieu enseignant sur ce projet, se livre, à défaut d’engager un vrai débat, à des attaques personnelles indignes à l’égard de l’actuelle ministre de l’Education nationale.

Luc Ferry, ancien titulaire de ce poste durant le mandat de Sarkozy, est un des plus virulents. Il exprime son mépris à l’égard de la personne plus qu’il ne développe des critiques argumentées sur la réforme qu’elle propose. Ce philosophe ferait mieux de se souvenir qu’il n’a pas laissé, lorsqu’il dirigeait ce ministère, une trace impérissable. Pis encore, tout le monde a en mémoire qu’il a échoué et qu’il a quitté la Rue de Grenelle complètement démonétisé. Toute honte bue, le voilà, quelques années après, s’en prenant à la personne de celle actuellement en poste.

Une nouvelle fois, encore, ce n’est pas le fruit du hasard. Ce sont toujours les mêmes cibles. A l’instigation de Sarkozy, la droite vise ces deux femmes politiques parce qu’elles sont différentes. Cela s’inscrit à la fois dans une stratégie de facilité  et surtout parce que ces attaques ad hominem sont de nature à plaire à un électorat de type frontiste.

On en conviendra, de telles orientations et pratiques confinent au degré zéro de la politique.

Jean Félix Madère

 

Prochain blog le 1er juin

 

(1)  Folliculaires : journalistes sans talents et sans scrupules. Ecrivassiers…

(2)  La majorité des syndicats est vent debout contre la réforme proposée par Najat Vallaud-Belkacem. Sans doute n’ont-ils pas tort de réclamer des améliorations, voire des modifications de cette réforme. Ils sont dans leur rôle.

Ils pourraient néanmoins utilement s’interroger sur les conséquences du dispositif « de collège diversifié » préconisé par Bruno Le Maire. Il porte en lui, inéluctablement, le processus de sélection et comme le dit P. Watrelot dans Le Monde du 20 mai 2015, Monsieur Le Maire cite la mécanique ou la technologie. Qui sera orienté vers ces options si ce n’est les enfants d’ouvriers ? ».

Ils devraient aussi, au-delà de ce processus « type gare de triage » induit par les propositions du député de l’Eure, être attentifs à l’accentuation prônée de l’autonomie des chefs d’établissements et au rassemblement prévu, en un seul corps, des enseignants du CP à la 3ème

Il y a là, sans entrer plus avant dans le détail du programme Le Maire pour les collèges, sérieuse matière à réflexion pour les professeurs et leurs syndicats.

Publicité
Publicité
Commentaires
les propos de madère
Publicité
Archives
Publicité