Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
les propos de madère
14 décembre 2015

Les propos de Madère - Le prix à payer

Le prix à payer

Beaucoup de commentaires ont été faits tout au long de la soirée des élections régionales du 13 décembre. Au lendemain de cette consultation électorale les observateurs poursuivent leurs réflexions. Ils en sont déjà à en tirer des leçons pour la Présidentielle de 2017. C’était inévitable.

Il n’est pas utile d’aller si vite. Il convient, nous semble-t-il, de  tenter de dégager quelques constats importants et de situer ce qu’il faut entreprendre à la lumière des enseignements de ce scrutin.

Reconnaissons d’abord que malgré le barrage réussi contre l’accession du Front national à la présidence des régions, ce parti a obtenu des résultats qui le placent désormais dans une situation clé dans la vie politique du pays. On est désormais, au moins pour l’immédiat, dans la tripartition.

Progressant de plus de huit cent mille voix au 2ème tour et réunissant ainsi 6,82 millions d’électeurs, le FN ne peut plus être considéré comme un parti marginal.

Force est de constater qu’il est présent partout sur le territoire - on avait pu le vérifier lors du 1er tour – et qu’il rassemble dans toutes les tranches d’âge de la population, dans tous les milieux et jusque et y compris dans le secteur public.

Le 13 décembre marque peut-être son enracinement dans la société française.

On a tout dit sur les raisons de cette situation qui trouve sa source il y a longtemps : chômage de masse durable, progression – au moins dans les esprits – de l’immigration, fiscalité débridée, inégalités, rejet de la classe politique, etc… Il est donc inutile d’insister. Les partis traditionnels ont commencé à reconnaître  qu’il y avait péril en la demeure et qu’il était temps qu’ils dégagent des solutions pour porter remède à des problèmes jetant une partie de la population dans les bras d’un parti extrémiste.

On notera qu’au soir des résultats personne, tant à gauche qu’à droite, ne s’est livré aux commentaires dithyrambiques habituels sur les plateaux télévisés. Pour l’essentiel, les intervenants ont donné dans la sobriété, le plus souvent dans l’humilité  et la prudence. C’était le moins qu’ils pouvaient faire.

En effet, même si la droite a reconquis l’Ile de France et six autres régions, on est loin de la vague bleue annoncée. C’est d’autant plus vrai que dans le Nord Pas de Calais-Picardie, en Provence-Alpes-Côte d’Azur et en Alsace-Lorraine-Champagne-Ardennes elle n’aurait pas regagné ces régions sans les votes importants de la gauche pour leurs listes.

Quant à la gauche, si elle « sauve les meubles » en conservant cinq régions, elle n’a pas de quoi triompher.

N’oublions pas en effet qu’en 2010, au-delà du fait que seule l’Alsace était restée à droite, la gauche avait, au 1er tour, réuni 50,2 % des suffrages alors qu’en 2015 elle n’en rassemble plus que 36 % ! (1)

La droite, pour sa part, alors qu’elle est dans l’opposition et aurait dû, comme il est habituel dans cette situation, obtenir un franc succès,  se contente – si l’on peut dire – de passer, toujours au 1er tour, de 31,5 % de votants en 2010 à 32,6 % en 2015. Maigre résultat, ce d’autant plus que le Front national fait un bond spectaculaire progressant, toujours en comparant 2010 à 2015, de 11,4 % à 28,4 %.

Ces rappels expliquent mieux qu’un long développement la modestie des leaders politiques de droite et de gauche même si les triangulaires ont masqué la réalité des choses. Certes, on ne peut que se féliciter du sursaut essentiel que représente l’importante progression de la participation au 2ème tour. Il est ainsi venu renforcer le barrage organisé contre le Front national par le retrait exemplaire des listes de gauche.

Tout cela était nécessaire. Maintenant, il faut que les partis dits de gouvernement ne se limitent pas à des déclarations de bonnes intentions et entament la reconquête de cet électorat qui s’est aussi massivement reporté sur un parti extrémiste. Faire passer autant de citoyens d’un vote contre à un vote pour ne sera pas une petite tâche. Leur désillusion est telle – c’est vrai aussi pour les abstentionnistes – que l’entreprise sera sans doute longue et, disons-le, pas achevée au moment où se tiendra la prochaine échéance majeure, c’est –à-dire la Présidentielle de 2017. Cette partie non négligeable de la population ne doit pas être méprisée, sous-estimée. Il faut la respecter, tenter de regagner sa confiance.

Ainsi, au-delà des refondations ou des recompositions discutables dont beaucoup parlent, il est nécessaire d’entamer sans plus attendre le travail de reconquête. Les raisons de la désaffection, nous l’avons dit, sont connues. La lutte contre le chômage en est le cœur tout comme l’immigration et  l’islam. Cela postule des mesures exceptionnelles et rapidement applicables ainsi qu’un formidable travail de vérité sur la réelle importance de tout ce qui touche à l’Etranger et à ses droits.

L’essentiel de la tâche repose sur ceux qui sont aujourd’hui au pouvoir. Le parti socialiste leur réclame, par la voix de son Premier secrétaire, des inflexions ciblées dans sa politique. Il a, et c’est une première, le soutien de son aile gauche jusqu’ici installée dans une fronde peu adaptée aux réalités du moment.

Le gouvernement se doit de répondre de manière concrète à cet appel d’évolution. Ainsi, le Premier ministre ne peut se contenter de dire que « le gouvernement est prêt à changer de comportement mais pas de politique ».  Cette déclaration est inappropriée pour répondre effectivement et vite au coup de semonce donné par bien des électeurs qui ont envoyé par leur vote un véritable signal de détresse à ceux qui sont en responsabilité.  Le poids de cette responsabilité, s’il pèse sur le parti socialiste et plus largement sur la gauche qui doit s’interroger sur l’ensemble de son comportement, relève aussi de l’opposition qui doit cesser d’accuser la majorité de tous les maux. Pour avoir été au pouvoir, ses leaders n’ignorent pas qu’ils n’ont pas réussi à endiguer le chômage et que leur bilan ne mérite guère d’éloges.

Ainsi, il n’est pas faux de dire que le temps n’est plus seulement à l’invocation des valeurs et de la République. C’était nécessaire avant les élections. Désormais il faut des réponses concrètes. Mots et promesses ne suffisent plus.

Soyons conscients que rien n’est facile. Une large part du pays est dans un tel état de désespérance – ces élections le prouvent ô combien – que des choix nouveaux vont s’imposer.

Comme le Président de la République l’a dit à propos de la sécurité, il est impératif désormais que la lutte contre le chômage prenne le pas sur d’autres impératifs économiques si on veut éviter le pire. Il est indispensable aussi d’expliquer, d’expliquer sans cesse et de démontrer que l’ »Autre » ne prend pas des droits à chacun.

Sans tout remettre en cause, c’est le prix minimum à payer pour retrouver la confiance d’une majorité de Français.

 

Jean Félix Madère

Le 14 décembre 2015

(1) Le niveau des votes au 1er tour permet de situer clairement le poids de chacun. En effet, lors des deuxièmes tours des fusions, rassemblements,  retraits ou appels à voter hors de son camp initial ne permettent plus l’évaluation incontestable des forces.

 

Publicité
Publicité
Commentaires
les propos de madère
Publicité
Archives
Publicité