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les propos de madère
24 mars 2015

Les propos de Madère

Premières réflexions sur un scrutin

 

Les résultats des élections départementales du 22 mars sont maintenant connus. Ils ont fait l’objet de nombreux commentaires et de multiples analyses. Face à la réalité des chiffres il est inutile de se contorsionner pour tenter d’amplifier les succès ou réduire les déconvenues.

Il faut dire les choses dans leur brutalité, que cela plaise ou non : le Parti socialiste a essuyé une défaite ; le tandem UMP/UDI  a réalisé un bon score ; le Front national a engrangé des succès incontestables et a progressé dans des proportions considérables. Front de gauche et Verts n’ont pas réussi à obtenir les résultats significatifs qu’ils espéraient. Ils en sont très loin.

On peut, certes, se livrer à des exégèses plus fines mais ce tableau se suffit à lui-même. Il illustre le résultat de la première manche de ces élections.

L’important est maintenant d’envisager la suite à court et moyen terme. Observons d’abord que l’abstention a été moins forte que celle annoncée par tous les sondages. Cela signifie qu’existe, pour tous les candidats restant en lice des possibilités de mobilisation non négligeables.

Remarquons ensuite que le recul du Parti socialiste est sans doute dû à la déception d’une partie de l’électorat sur l’insuffisance des résultats de la politique gouvernementale mais il est clair que la division de la gauche a été un facteur déterminant. Si les candidats socialistes, dans plus de 500 cantons, ont été éliminés au premier tour cela résulte aussi pour beaucoup de l’éclatement de ce que fut, en 2012, la majorité présidentielle.

Il n’est plus temps de pleurer, le « lait est renversé » irrémédiablement dans beaucoup de départements. Toutefois, on peut encore, dans plus de 1500 cantons, tenter de renouer les fils d’une majorité effilochée et présenter, pour le deuxième tour, une gauche unie.

Là réside la clé du maintien de la gauche dans de nombreux départements.

Il faut mettre de côté motifs de division, rancœurs et reproches. Dans les départements où la plupart du temps les différentes composantes de la gauche ont assumé ensemble la gestion des affaires il ne devrait pas être très difficile de retrouver le chemin du rassemblement.

Il est indispensable, car la bataille sera rude face à un FN qualifié dans de très nombreux cantons et à une UMP revancharde et visant à reprendre le contrôle de beaucoup de départements perdus au fil des élections depuis une vingtaine d’années. La tâche sera compliquée dans de nombreux cantons où, contre toute attente, auront lieu des triangulaires. Il faudra compter, plus encore que dans les face-à-face FN/PS  ou UMP/PS, quoi qu’en dise la direction de l’UMP,  avec la porosité entre les deux électorats de droite.

Si le Parti socialiste a indiqué qu’il appelait au Front républicain, c’est-à-dire à voter pour la droite si c’est nécessaire, Sarkozy a renouvelé son fameux « ni-ni », incitant les électeurs de l’UMP à ne pas voter socialiste. Ainsi, il joue sur le report non avoué de voix du FN sur les candidats de l’UMP mais aussi il ne néglige pas, là encore sans le dire, les voix de la gauche visant à faire barrage au Front national !

Bref, il veut construire sa victoire, son retour au premier plan et renforcer sa position en vue de la primaire au sein de son Parti, en jouant sur tous les tableaux. Son calcul, teinté d’un certain machiavélisme, pourrait néanmoins, à force d’être sans scrupules, dégouter bien des électeurs de gauche. Il n’est pas impossible qu’ils demeurent sourds aux consignes des dirigeants du PS. Beaucoup commencent, en effet, malgré les dangers que représente le Front national, à ne pas comprendre que d’un côté  la gauche les appelle à voter à droite pour faire barrage au FN et qu’il n’y ait aucune réciprocité lorsque ce parti est opposé au PS.

Bref, c’est dans ce contexte que va se dérouler le deuxième tour des élections départementales. On le voit, rien ne sera épargné au Parti socialiste et plus largement à la gauche.

Il faut pourtant mener cette bataille. D’abord pour, nous le répétons, sauvegarder au maximum le leadership des forces de progrès partout où cela sera possible mais aussi au-delà des enjeux d’influence partisanes parce que se joue le maintien ou non des politiques sociales et de proximité essentielles pour les populations les plus faibles.

Ne l’oublions pas, l’orientation de l’action des départements ne sera pas la même si demain ils continuent à être dirigés par la gauche, ou basculent à l’UMP, voire au Front national.

Ensuite, à moyen et à plus long terme, ces élections locales constituent des étapes pour le maintien au pouvoir de la gauche. Certes, on a déjà connu ces mouvements de balanciers alternant gauche ou droite au pouvoir. Sarkozy est un expert en la matière : il a perdu toutes les élections intermédiaires durant son quinquennat. Cela explique sans doute sa frénésie de revenir aux affaires !

Désormais la situation est autre. Le Front national s’implante à tous les niveaux. L’événement le plus important dans ce premier tour est, au-delà des pourcentages record qu’il a engrangés, sa présence dans l’ensemble du territoire. Fait plus alarmant encore, il a réalisé des scores impressionnants dans le milieu rural, dans les villages et les petites villes. Jusqu’ici, ces endroits étaient des facteurs de stabilité dans l’électorat avec, pour particularité, une politisation modérée, très éloignée des extrêmes.  Ce n’est plus le cas, ces « rurbains » comme on les appelle, au grand étonnement des maires habitués à bien connaître leurs administrés, se révèlent des espèces de « Chevaux de Troie » de l’extrémisme, au sens du parti des mécontents.

Ce mouvement, généralisé dans les départements de gauche, pourrait être le terreau de l’enracinement du FN et demain de sa « notabilisation ».

Il est donc urgent que la gauche qui est très concernée dans son devenir se ressaisisse. Elle doit le faire immédiatement lors du deuxième tour de ces départementales mais ensuite en reconstruisant, au plan national, les pratiques d’unité.

Le gouvernement et le Président de la république, au vu des résultats du premier tour, sont fondés à dire qu’il n’y a pas dans le pays un appel pour « gauchir » leur politique. Les scores du Front de gauche et des Verts ne vont pas dans ce sens. Le signal donné par la population tend plutôt vers une dérive droitière du pays. Ceci précisé, François Hollande et Emmanuel Valls, même s’ils considèrent que leur politique commence à porter des fruits, doivent admettre qu’ils ne rassembleront la gauche, pour mener le combat notamment contre le FN, qu’en donnant des  signaux plus positifs à leur électorat. On ne peut pas, même au nom du redressement des comptes, donner le sentiment qu’il y a un déséquilibre des efforts entre les différentes composantes du pays.

Finalement, ce premier tour des élections départementales qui devait donner simplement un éclairage local sur les rapports de forces dans le pays s’avère, lorsqu’on veut bien ne pas regarder que les pourcentages, un révélateur de problèmes plus fondamentaux : l’émergence du tripartisme, l’installation prouvée du Front national dans l’ensemble du pays et la nécessité absolue pour la gauche de se rassembler.

Le deuxième tour peut modifier un peu les choses. Il est cependant à craindre que la droite et l’extrême droite amplifient leur succès. Ce sera l’heure de l’addition résultant de la division.

L’essentiel, pourtant, pour la suite, sera de tirer, dans la durée, les leçons de ce scrutin.

Jean-Félix Madère

 

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