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les propos de madère
20 octobre 2015

Les propos de Madère - Notes de lecture 20 octobre

Notes de lecture

Parmi mes lectures de ces dernières semaines, je signale quatre livres : « Le stage est fini » de Françoise Fressoz, « La brigade du rire » de Gérard Mordillat, « L’étranger » d’Albert Camus et « Le monde est clos et le désir infini » de Daniel Cohen.

Quelques commentaires à propos de ces ouvrages.

Le stage est fini de Françoise Fressoz, essai politique publié en août 2015 aux éditions Albin Michel (251 pages) traitant des trois premières années de François Hollande à l’Elysée.

Tout au long de cet ouvrage, très documenté, elle se montre féroce à l’égard du Président de la République. Elle ne lui épargne rien tant dans la critique de ses choix politiques que dans la relation ironique des difficultés traversées dans sa vie privée.

Elle souligne ainsi « qu’il est encombré d’une compagne instable, que les équipes qui l’entourent sont faibles et que son projet pour le pays est incertain ».

Ce tableau se veut dévastateur pour l’hôte de l’Elysée. Françoise Fressoz va jusqu’à dire qu’il est « sous la coupe ou presque d’Angela Merkel » et qu’il est l’objet de mépris de bon nombre de ses ministres.

Partant de la théorie qu’il a suivi, durant trois ans, une sorte de stage désormais fini, la journaliste du « Monde » laisse à penser que s’il a appris dans bien des domaines, il ne maîtrise guère bien des paramètres de sa fonction.

Tous ceux qui suivent avec attention la vie politique, même s’ils ne partagent pas les idées de François Hollande, trouveront sans doute très excessif le portrait fait dans ce livre.

La critique de ceux qui nous gouvernent est naturelle en démocratie. On peut admettre l’ironie, voire la dérision, mais le sentiment de mépris qui se dégage du récit de Françoise Fressoz est très excessif.

Certes, elle lui reconnait un « inébranlable optimisme face aux épreuves » mais elle ne peut s’empêcher, dans sa conclusion, d’écrire, telle un professeur savant : « L’appréciation de fin de stage en découle : bonnes intentions mais toujours un train de retard ».

Françoise Fressoz est journaliste au Monde. Elle écrit chaque semaine dans ce journal un billet politique. Elle a publié deux essais : « La malédiction de Matignon » en collaboration avec Bruno Dive (Plon 2005) et « Le procès de Jacques Chirac » avec Pascale Robert Diard (Les arènes 2010).

La brigade du rire de Gérard Mordillat, roman publié aux éditions Albin Michel en mai 2015 (515 pages). Il raconte une histoire rocambolesque. Une bande d’hommes et de femmes qui, pour la plupart se sont connus jeunes, se retrouvent, alors qu’ils commencent à être d’âge mûr, comme ils le font régulièrement.

Ils sont très différents les uns des autres et ont des parcours de vie et des personnalités très dissemblables. Ils ont néanmoins des idées politiques assez proches.

Les personnages principaux se nomment Kowaleski, dit Kol, imprimeur licencié et dont le trait de caractère dominant est d’être en permanence en colère, remonté contre tout. Betty, licenciée de la même imprimerie, malheureuse en ménage, trouvant des réconforts passagers auprès de Kol. Dylan, prof d’anglais atypique. Les jumelles Dorith et Muriel, femmes libérées vivant avec le même homme. L’Enfant Loup, garagiste porté sur la bagarre. Rousseau, professeur d’économie lui aussi plutôt original. Hurel, industriel mais néanmoins lecteur de Marx.  Isaac, distributeur de film. Victoria, jongleuse et compagne de l’un des copains de  la bande qui n’a pu se rendre au rassemblement. Il est mort. Elle le remplace.

Tous ces gens ont aussi en commun une certaine idée de la société bourgeoise. Un homme incarne à leurs yeux les travers de cette société, Pierre Ramut, éditorialiste vedette au journal « Valeurs françaises ».

En utilisant des ruses picaresques, ils l’enlèvent, le séquestrent dans un bunker transformé en atelier où ils le font travailler. Ils recréent ainsi les conditions que ce journaliste souhaite pour les ouvriers dans ses papiers : semaine de 48 heures, salaire de 20% inférieur au Smic, travail le dimanche, cadence de travail élevé, etc…

Mordillat place dans la bouche des kidnappeurs des propos dignes des plus fortes saillies de responsable communistes. Il se sert de l’intrigue pour dénoncer les injustices et évoquer les luttes, à ses yeux insuffisantes, du monde ouvrier. Son insistance à vouloir placer ses couplets altère un peu la force de l’intrigue de son livre.

Dommage car cet ouvrage est plaisant à lire. Son titre « la brigade du rire » illustre bien la dérision de la situation.

Gérard Mordillat, écrivain-cinéaste, appartient indéniablement à une gauche radicale. Longtemps proche du Parti communiste, il soutient aujourd’hui J.L. Mélenchon. Bien qu’un peu amer, c’est un homme qui traite toujours avec talent des sujets sociaux et politiques. On peut se retrouver dans nombre de ses propos, sauf lorsqu’il verse dans l’excès… hélas souvent.

Auteur prolifique, il a écrit de nombreux ouvrages. Les plus connus sont   « Vive la Sociale » et les « Les vivants et les morts ». Au cinéma, son film le plus connu est aussi « Vive la sociale » tiré de son livre éponyme.

L’étranger d’Albert Camus, publié aux éditions Gallimard en 1942, réédité dans la collection  Folio en août 2015 (184 pages).

C’est le premier roman d’Albert Camus. Il raconte l’histoire, nous devrions dire la dérive, d’un homme qui évolue progressivement, au travers de fréquentations douteuses et sans le vouloir, d’une condition ordinaire de petit employé en Algérie à celle d’assassin par hasard.

De la mort de sa mère, à l’enterrement de laquelle il ne pleure pas, aux rencontres de voisinage de hasard, Camus décrit, dans des phrases courtes dont il a le secret, une sorte de descente aux enfers.

Meursault, personnage principal, subit son sort et décrit sa marche vers la guillotine comme s’il s’agissait d’un témoin de sa mort annoncée. Jouet d’un destin tragique, il semble étranger à lui-même.

Bien des critiques littéraires se sont perdus en conjectures sur la signification exacte et sur le sens profond donné par l’auteur à cet ouvrage. Camus a répondu qu’il ne fallait pas y voir une recherche où se dissimulerait une philosophie cachée sur la vie. Il s’agit simplement d’un roman où est décrit le parcours d’un personnage ordinaire aimant le soleil, tombant amoureux de Marie, puis qui est entrainé dans des événements qui le dépassent.  Il commet alors l’irréparable.

Albert Camus, prix Nobel de littérature en 1957, a publié beaucoup plus d’essais que de romans. Il fut aussi un auteur de pièces de théâtre célèbres : « Les justes », « Caligula », « L’état de siège ». Ses récits, « La peste », « La chute », figurent aussi parmi ses œuvres marquantes.

Le monde est clos et le désir infini de Daniel Cohen est un essai sur la croissance économique et ses limites. Publié en août 2015 aux éditions Albin Michel (217 pages). Ce livre est en voie d’être un best-seller et un ouvrage de référence pour tous ceux qu’intéressent les réflexions sur l’économie.

L’auteur s’attache, dans une vaste réflexion, à démontrer qu’il va devenir de plus en plus difficile de maintenir le niveau de croissance que les sociétés avancées ont connu jusqu’ici. Il déroule une vaste fresque rappelant les grandes étapes de l’évolution de l’humanité. Ce retour est parfois d’une lecture ardue mais il permet de bien situer les raisons pour lesquelles « la croissance est devenue intermittente, fugitive ». Il s’interroge ensuite sur l’avenir. Ses observations sur l’évolution du travail humain sont pertinentes et intéressantes.

Dans la dernière partie de son ouvrage, il ouvre des pistes et suggère qu’il est nécessaire de « repenser le progrès ».

Dans cet ultime chapitre, il pose plusieurs questions au sujet du monde moderne : « Que deviendra-t-il si la promesse d’une croissance indéfinie est devenue vaine ? Saura-t-il trouver d’autres satisfactions ou tombera-t-il dans le désespoir et la violence ? ».

Ce livre est en tout point remarquable. Certes, ce n’est pas un roman policier. Il est parfois d’un abord complexe mais, lorsqu’il est lu avec attention, il permet à chacun de trouver des réponses à de nombreux problèmes économiques mais aussi, et ce n’est pas paradoxal, de se livrer à des interrogations personnelles nées de sa lecture. Il conviendra, sans doute, de le relire plusieurs fois pour en assimiler toutes les informations qu’il contient.

Daniel Cohen est directeur du département d’économie de l’Ecole normale supérieure et cofondateur de l’Ecole d’économie de Paris. Il est l’auteur de nombreux ouvrages. Citons « Homo economicus, prophète (égaré) des temps nouveaux » Albin Michel (2012), « Trois leçons sur la société post industrielle » Le seuil (2006) et « La mondialisation et ses ennemis » Grasset (2004).

Bonne éventuelle lecture.

 

Jean Félix Madère

 

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