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les propos de madère
22 octobre 2015

Les propos de Madère - Convergences contre l'immigration

Convergences contre l’immigration

 

Les élections législatives, dimanche dernier en Suisse, ont suscité peu de commentaires tant dans la presse qu’à la télévision. Elles méritent pourtant qu’on s’y arrête un peu parce qu’elles confirment le développement, partout en Europe, d’un courant xénophobe. L’exemple helvète est d’autant plus intéressant mais aussi important car ce pays n’est pas concerné par une très forte immigration qui ailleurs suscite des mouvements d’opinion.

De même, le faible taux de chômage en Suisse – environ 3 % - ne peut être à l’origine, comme en France, d’un rejet de l’étranger entrant soit disant en concurrence pour l’obtention d’un emploi.

L’origine du vote xénophobe se trouve dans une sorte de peur de l’islam qui a gagné l’ensemble des pays européens (1). On redoute la possible mise en cause de coutumes locales et des modes de vie traditionnels. Rien n’est ici rationnel.

Les observateurs ont en effet remarqué qu’en Suisse ce sont dans les cantons où les immigrés sont les plus présents (Genève et Zurich) que les votes xénophobes ont été les moins nombreux.

La droite populiste suisse (UDC – Union démocratique du centre) a renforcé ses positions à partir d’un discours de rejet de l’Europe et en dénonçant, sans raisons profondes et évidentes, l’immigration en général. Cela lui a permis d’obtenir 29,3 % des voix. C’est un chiffre qui s’inscrit désormais dans la norme de beaucoup de pays Européens. Il témoigne de la vigueur d’un courant extrémiste  qui bientôt n’épargnera plus aucune nation démocratique. On aurait pu penser que la Confédération helvétique, réputée pour sa modération, serait à l’abri de telles tendances. Les récentes élections prouvent le contraire et doivent alerter sur les risques de l’extension de la xénophobie.

Cette alerte doit être d’autant plus vive que d’autres signaux viennent d’être envoyés dans ce sens en ce début de semaine en Allemagne.

A l’appel de Pegida (mouvement des patriotes européens contre l’islamisation de l’occident) le lundi 19 octobre, 15.000 manifestants se sont réunis à Dresde pour clamer leur haine de l’étranger.

Ils ont exprimé, avec violence, leur crainte d’être envahis et ovationné Victor Orban, Premier ministre populiste Hongrois, Poutine et Marine le Pen !

Certains manifestants ont défilé en brandissant des écriteaux montrant Angela Merkel en tenue nazi : la croix gammée de l’uniforme a été remplacée par le symbole de l’euro.

Ils ont dressé des potences pour les traîtres : Angela Merkel et Sigmar Gabriel (Vice chancelier socialiste). Pis encore, comme le rapporte le « Monde » du 21 octobre, le sulfureux écrivain germano-turc Akif Pirinçci s’adressant à la foule a condamné l’islam, les homosexuels, la libération des femmes et il a déclaré : « Il y aurait bien une autre solution. Mais les chambres à gaz sont malheureusement hors service ». Que de tels propos soient tenus dans un pays qui a connu le nazisme est proprement stupéfiant et donne la mesure de la montée des idées extrémistes.

Certes, face à cette foule haineuse, une contre-manifestation a été organisée et elle a réuni presque autant de monde. Certes, Angela Merkel et Sigmar Gabriel maintiennent leurs positions favorables à l’immigration.

Force cependant est de constater que l’un et l’autre sont de plus en plus contestés au sein même de la CDUCSU et du SPD.

La chancelière Allemande a perdu de nombreux points dans les sondages tant le doute s’est installé dans les esprits. Le petit parti d’extrême gauche, Die Linke, très proche des thèses de Mélenchon en France, en est réduit à mettre en sourdine son soutien aux réfugiés…

Dans le même temps, le nouveau parti populiste « Alternative pour l’Allemagne » (AFD) représente 7 %, c’est-à-dire un pourcentage suffisant pour accéder au Bundestag. Il comble ainsi la sorte de vide qui existait jusqu’ici entre la droite classique allemande (CDU CSU) et les groupuscules néo-nazis.

Tout cela est constaté sur un fond de violences notamment la tentative d’assassinat de la candidate à la mairie de Cologne par un sympathisant d’extrême droite. Cela n’a pas empêché Madame Reker d’être élue et de recevoir ainsi le soutien d’une majorité de citoyens de cette ville.

Pourtant, la dégradation des rapports démocratiques en Allemagne, longtemps immunisée par le terrible souvenir de la période nazie, est bien réelle. Pour l’essentiel, elle trouve sa source dans une opposition de plus en plus exprimée sans réserve contre l’immigration.

La France, on le sait, n’échappe pas à ces dérives constatées ailleurs. Le Front national ne cesse de progresser. Il est donné gagnant dans plusieurs régions lors des élections régionales de décembre prochain. Marine Le Pen est présentée comme incontournable pour la présidentielle de 2017. Bref, une large part de l’opinion française se retrouve dans les thèses d’extrême droite.

Ce parti, désormais considéré comme « propre sur lui » est en passe de s’installer durablement en surfant sur le triple courant : anti-immigration musulmane, anti Europe et rejet des politiques classiques tant de droite que de gauche.

Ainsi, malgré les déclarations de Marine Le Pen elle-même assimilant les prières de rue à l’occupation allemande (2) et de son compagnon Louis Alliot disant il y a peu : « Soyons clairs sur la dédiabolisation. Celle-ci ne concerne que notre présomption d’antisémitisme, rien d’autre. Pas l’immigration ou l’islam sur lesquels, à la limite, il n’est pas mauvais d’être diabolisé. » Rien ne ralentit le courant de soutien au FN. En fait, on le voit, ceux qui votent Front National adhérent à ces thèses. Comme ils sont de plus en plus nombreux et totalement décomplexés le danger est grand de voir le Front national, grâce  à leur appui et à leurs votes, gagner, à la régulière, les élections prochaines.

En réalité, les sociétés française et européenne  sont de plus en plus perméables aux extrêmes. Des individus qui jusqu’ici, bien que de tendance droitière, avaient su ne pas franchir certaines limites, expriment désormais, sans vergogne, les pires idées. Après l’essayiste Eric Zemmour, le retraité de la politique Philippe de Villiers vient de s’illustrer dans ce registre. Dans un ouvrage publié récemment (Le moment est venu de dire ce que j’ai vu) il se lâche et écrit : « La France n’a pas vocation à devenir la fille ainée de l’islam », « L’Europe a organisé le chassé-croisé : avortement de masse, immigration de masse, le sort des petits Blancs est déjà scellé. Il pourrait ressembler demain à celui de Indiens d’Amérique » (Le Monde du 21 octobre). Il recueille les applaudissements de Patrick Buisson, ancien conseiller Maurassien de Nicolas Sarkozy et ne va pas tarder à intéresser à nouveau le Front national qui se désespérait, jusqu’ici, de ne pas l’avoir attiré dans ses rets.

Répondra-t-il à des appels qu’il a repoussés jusqu’ici ?

Là n’est pas l’important.

L’important est qu’on puisse développer de telles idées dans notre pays et, pire encore, qu’elles trouvent un écho grandissant au plus profond du peuple.

Ces convergences anti immigration constatées un peu partout doivent rendre conscient du danger que représente, pour la France et l’Europe, ce courant qui se situe résolument à l’inverse des idéaux démocratiques des grands pays européens.

 

Jean Félix Madère

Le 23 octobre 2015

 

(1)  Il est très probable qu’un phénomène de même nature se produise le 25 octobre, lors des élections législatives en Pologne. Le rejet de l’étranger y est à son comble. Le parti conservateur « droit et justice » (PIS)  recueille 34 % des intentions de vote et l’essentiel de sa campagne est basé sur « la crise des migrants ». Les arguments les plus fallacieux sont utilisés pour faire peur aux Polonais. On y atteint des sommets dans les mensonges et les outrances. La Pologne va sans doute, au soir du 25 octobre, être dotée du gouvernement le plus raciste d’Europe !

 

(2)  Traduite en justice à ce sujet le 20 octobre, Marine Le Pen paraît devoir échapper à une éventuelle condamnation. Le procureur estime en effet qu’elle bénéficie, dans cette affaire, du principe de « liberté d’expression ». Il n’en reste pas moins que ses propos sont scandaleux.

 

 

 

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